Naissance d'Auguste à la maison, sans assistance médicale
Cette expérience reste gravée dans ma mémoire, elle est unique dans la vie d'une femme, difficile mais magique.

Témoignage de Véronique, la maman

Vendredi 27 janvier 2005

J'ai l'impression de sortir d'un long tunnel, entre le début de grossesse très pénible, les douleurs lombaires apparues vers le 4ème mois, la menace d'accouchement prématuré vers le 6ème mois, et les difficultés à suivre une vie normale sur la fin de la grossesse vu le volume de mon ventre... puis s'en est suivi l'accouchement, chose merveilleuse et horrible à la fois, un accouchement qui pour moi est souvenir de souffrance avant tout, et puis ce fut le tour des tranchées, puis les difficultés d'allaitement, puis le début d'endométrite... voila j'espère enfin voir la surface et profiter enfin de ces instants merveilleux.

Par ces lignes je vais essayer de transcrire des sentiments opposés que peu d'expériences telles que l'accouchement peut provoquer : le plaisir et la souffrance, l'inquiétude et l'impatience, la douleur et le bonheur....
Auguste est né le 13 janvier 2005 à 7h30 du matin à la maison, sans assistance médicale.
Quand exactement peut on dire que le travail a commencé ? Je n'en sais rien...
La nuit du 26/27 décembre sûrement. A la suite de ce premier travail les contractions ne cessèrent plus, plusieurs fois le travail me semblait commencer, pour me laisser en plan 1, 2 , ou 3 heures après (en nous laissant sur notre faim et notre enthousiasme)
Mais évidemment cette nuit du 12/13 janvier les contractions ne se sont pas arrêtées.
Les contractions douloureuses mais gérables ont commencé vers 1 h du matin (le 13). Serge se réveille, active les feux et fait chauffer de l'eau, il installe la pièce en bas, met un matelas prés de la cheminée. Je le rejoins rapidement. Très vite les contractions deviennent difficiles car elles me créent une douleur très forte en ceinture du bas ventre et du bas du dos. J'ai du mal à m'abandonner à cette douleur tellement elle est forte. Surtout que Serge n'arrête pas de " s'absenter" pour préparer multiples choses. J'entre dans le bain très chaud dans notre bassine de 120 litres juste devant le feu. Je demande à Serge de rester près de nous pendant les contractions, ce qui m'aide beaucoup, juste le fait de lui serrer la main. Mais j'ai très vite très chaud, l'eau est bouillante et le feu marche très fort. Cela m'a fait du bien mais je dois sortir du bain.
Je m'allonge sur le petit matelas mais les contractions en position allongée sont insupportables. Je cherche une autre position mais aucune ne me soulage.
Je crois que c'est vers ce moment que je commence à perdre de la force. Je me souviens avoir dis à Serge "je n'y arriverai jamais", les larmes me venaient, et les cris envahirent la maison. La pensée d'une péridurale à l'hôpital me traverse l'esprit. La douleur au dos est trop forte, je n'en sens même plus la douleur dans le ventre. Je commence à perdre pied.
Serge souhaite m'examiner. J'hésite. J'ai envie de répondre à son besoin, mais l'annonce d'un col peu ouvert ne ferait que me
décourager complètement, hors j'ai besoin de force. J'accepte car je sens que c'est important pour Serge, mais lorsque ses doigts sont dans mon vagin cela me fait mal et je repousse sa main en dehors violemment puis je pense que je dois changer de position, je décide de marcher, d'aller dans la pièce d'à côté simplement pour bouger, et puis il y fait plus frais, c'est bon. Serge m'accompagne à petit pas, des contractions me viennent, Serge me soutient en face à face sous les aisselles mais le tiraillement dans le dos me déchirait encore plus. A mi chemin du parcours autour de la table, j'ai envie de vomir. Je me vide dans une bassine, pliée en deux par une contraction, cette image me reste gravée.
Je reprend ma marche et retourne dans l'autre pièce. Il doit être environ 5 heures et je ne sais toujours pas où en est mon col et ne souhaite pas le savoir de peur d'être déçue.
Serge me prépare de nouveau un bain, mais je n'y reste pas longtemps, cherche du réconfort sur une chaise puis je retourne dans l'eau. J'adopte ensuite la position assise sur le dos soutenue par des coussins. Je demande à Serge de m'appliquer des compresses d'eau chaude dans le dos. J'aurais du y penser bien plus tôt. Mon dieu que cela me fait du bien et m'aide.
A ce moment là je retrouve d'autres forces. Tout d'abord grâce aux compresses d'eau chaude mais aussi parce qu'en mettant mes doigts dans mon vagin je sens la poche des eaux.
Au début j'ai cru que c'était la tête, et puis j'ai vu que c'était tout mou. C'est tout proche de la sortie, j'ai envie de pousser.
Encore assise sur le sol, SPLACH, la poche des eaux se rompt et le liquide se propulse à 1 mètre autour de nous par terre. Le liquide est clair, premier signe que tout se déroule bien et là tout s'enchaîne, une contraction puis une autre et c'est l'expulsion. Je la commence assise en appui sur les coussins dans le dos, puis je me tourne, Serge me met toujours des compresses chaudes, puis je pivote pour me mettre à 4 pattes puis me redresse. La tête est là à moitié sortie..ohhhhhhhhh que ça brûle, je hurle tout mes poumons, je me dis que je suis en train de me déchirer (alors que je n'ai eu aucune déchirure, je pense que les applications d'huile d'amande douce que j'ai faites tous les jours le dernier mois sur le périnée y ont aidé) puis vient le corps d'Auguste très rapidement la contraction suivante sans doute mais je ne l'ai pas senti, cela brûlait trop, j'ai tellement crié que le lendemain ma voix était cassée. J'entends Serge me dire, "ça y est Véro, c'est un garçon".
Moi je m'écroule, je suis ailleurs, dans le cirage quelques instants puis je me tourne ensuite vers ce petit. Il est magnifique, tout
propre, il nous regarde avec ces petits yeux. Heidi entre temps s'était réveillée (par mes cris certainement), elle a pleuré ou plutôt prit peur lorsque la tête est sortie (par mes fesses dit-elle) et aussi mes cris l'ont impressionnée puis quelques instants après lorsque Auguste est complètement sorti elle est revenue vers nous, puis elle me dit "je suis contente d'avoir un petit frère" "on peut le garder ce petit frère ?"
Peu de temps après le placenta sort, mais il reste accroché par un morceau à l'intérieur de mon utérus. Je décide de ne plus bouger pour pas qu'il se déchire. Et là je me retrouve coincée dans des couvertures trempées de liquide amniotique et de sang pendant environ 1h30. J'attrape froid et tarde à demander à Serge des chaussettes, une couverture et une bouillotte. Je me demande bien comment je vais me sortir de là car je suis immobilisée sinon je risque de tirer sur le placenta qui reste encore accroché.
Auguste est prés de moi, mais ne veut pas téter, il ne tétera qu'au bout d'une heure.
Inquiète par ce placenta qui "pend", je demande à Serge de faire le travail d'Auguste soit de téter à sa place. Les contractions
reviennent, Auguste accepte de téter et le bout de placenta se détache, il est impeccable (à mes yeux de maman et non de professionnel : c'est la première fois que j'en vois un et je ne pensais pas que c'était si gros). N'ayant pas la possibilité de le réchauffer (ayant froid moi même, et ne pouvant pas bouger) nous décidons d'habiller Auguste rapidement.
Serge coupe le cordon et le lie avec un lien en plastique. Mais pendant cette période (environ 1h30) entre l'expulsion et la délivrance complète Auguste perd du sang par le cordon. Mais nous le découvrons que lorsque délivrée je me lève de ces couvertures mouillées. Là quelques secondes de panique m'envahissent, cette image d'Auguste mouillé de sang sur ses vêtements, l'instant de rechercher l'origine du saignement et de constater que celui ci a cessé et le calme revient.
Libre de nos mouvements, nous nous nettoyons tous les deux et nous changeons de place, Serge nous installe un endroit propre et sec sur le petit matelas, mais c'est impossible pour moi de tenir Auguste contre moi tellement les contractions me font mal. A ce moment je me rends compte que nous manquons "d'équipements" des alèses en fait, car je ne peux pas me coucher sur le matelas de peur de l'innonder de sang.
Et je suis encore trop empotée pour me faire un coin confortable, je décide donc de me réchauffer comme ça, mais la position n'est pas confortable.
S'en est suivi 3 jours de contractions intenses, et surtout lorsque que j'allaitais.
J'ai cru revivre un travail d'accouchement pendant ces 3 jours, ce qui n'a pas facilité le démarrage de l'allaitement car je retirais Auguste du sein tellement j'avais mal et le remettais après la contraction et ainsi de suite.
Le lendemain 2 petits morceaux de placenta (comme de petits morceaux de foie) sont sortis et les saignements sont restés corrects, mais la crainte d'une hémorragie était là. Au bout de 4 jours j'ai retrouvé une partie de ma forme et ai recommencé mes activités quotidiennes mais je réalise que je marche comme une vielle dame, mon dos est rond, je suis encore pliée de
douleur. La réalité m'a vite rattrapé car 4 jours après j'étais de nouveau alitée avec 40 de fièvre. Le deuxième jour de fièvre Serge et moi nous décidons d'aller à l'hôpital (c'était un dimanche) afin de contrôler entre autre l'utérus. L'échographie montre la présence de sang dans l'utérus et le gyneco de garde décide de me mettre sous methergin et augmentin.
Au bout du 2ème jour de traitement la fièvre tombe et nous rentrons (contre avis médical) chez nous.
Je continue le traitement homéopathique car l'echo de sortie montrait encore la présence de sang dans l'utérus. Petit à petit le sang s'élimine. Petit à petit la lactation s'installe péniblement. Petit à petit Auguste reprend du poids (qu'il avait perdu lors de
l'hospitalisation). Petit à petit je retrouve mon autonomie et nous pouvons enfin savourer le fruit de notre amour.

Je ne regrette pas ce qui a été vécu, je suis contente d'avoir accouché dans ce lieu qui m'est cher et qui me lie à vie avec lui.
Je tiens à dire que jamais je n'aurais pu accoucher de cette façon à l'hôpital même en ayant signé un contrat de naissance
Jamais on ne m'aurait laissé crier ainsi, serge n'aurait pas pu me mettre les compresses sur le dos, je n'aurais pas pu faire le tour de la table, Heidi n'aurait pas pu voir sortir son petit frère, je n'aurais pas pu me tremper dans l'eau chaude, et savourer le lever du jour ensoleillé par la fenêtre en face de l'endroit où je délivrais.
Cette expérience reste gravée dans ma mémoire, elle est unique dans la vie d'une femme, difficile mais magique.

Véronique d'Auvergne