Naissance de notre fils Auguste à la maison, sans assistance.
Nous avons partagé un moment très fort en ne comptant que
sur nous pour dire oui à la vie.
Témoignage de Serge.
Depuis la naissance de notre fils, nous n'avons pas vu le temps passer.
Beaucoup de choses à faire à la maison, un petit séjour
à la maternité (à 1 heure de route avec des conditions
climatiques et de circulation difficiles) et mercredi dernier un arbre
qui tombe et nous coupe un peu plus du monde : plus de téléphone
ni d'électricité.
La maison de Véronique est au bout d'un chemin, isolée dans
la montagne à un peu plus de 1000 mètres d'altitude.
Choisir une naissance à la maison dans ce lieu demande un minimum
de confiance en soi et dans la vie.
Véronique a surmonté avec beaucoup de courage et de volonté
ses inquiétudes pour vivre la naissance de notre fils dans sa maison.
Nous avons partagé un moment très fort en ne comptant que
sur nous pour dire oui à la vie.
Une naissance à la maison c'est beaucoup de choses à prévoir,
à organiser et aussi tous les imprévus ...
J'ai le sentiment qu'une naissance se fait à travers nous, avec
plus ou moins de désir et de bonheur, que la vie appelle la vie
et que nous devons garder beaucoup d'humilité devant ce miracle
magnifique de la vie.
La naissance, la vie, la mort, ne sont que des étapes sur le même
chemin, et j'essaye de ne pas être trop influencé par les
connaissances de l'homme qui prétendent commander la vie.
Accueillir un enfant alors que j'ai le sentiment que la société
humaine fonce droit dans le mur n'est possible que parce que j'ai confiance
dans la vie.
Cette confiance me permet aussi d'accepter et de donner du sens à
la maladie et à la mort même si je reste encore influencé
par la peur, la marchandisation, la désinformation que nous subissons
chaque jour.
Pour la naissance de notre fils, le choix d'une naissance à la
maison me plaisait beaucoup mais c'était avant tout le choix de
Véro.
Je souhaitais la présence d'une sage-femme et des conditions d'accès
à un hôpital pas trop difficile parce que je craignais les
réactions des autres.
Quand finalement Véro et moi avons décidé que le
bébé naîtrait à domicile (avec des conditions
d'accès qui peuvent être très difficiles en hiver)
je souhaitais disposer d'un Dopler pour pouvoir réagir rapidement
en cas d'évolution "pathologique".
Ma confiance dans la vie ne me met pas à l'abri d'épreuves,
je tiens donc à ce que mes choix restent respectueux de mes proches
et de moi-même et autant que possible acceptables pour les autres.
Pour la naissance d'Auguste, nous avons laissé croire (à
part à nos proches) que la naissance à la maison n'était
pas un choix, que nous avons été pris de court. Nous avions
établi un contrat de naissance avec la maternité d'Aurillac.
Ceci parce qu'en cas de problème nous nous évitions beaucoup
de problèmes.
Le militantisme a ses limites. Nous avons choisi les nôtres.
Vero et moi, étions et sommes très heureux qu'Auguste soit
né à domicile.
Plusieurs "faux travail" (vrai préparation) nous avaient
laissé croire à une naissance entre Noël et fin décembre.
Finalement c'est au petit matin (1h30) du 13 janvier 2005, que le "vrai
travail" a commencé.
Nous avons compris rapidement que cette fois nous allions accueillir le
bébé dans quelques heures. Véro a pris les granules
homéopathique (Caulophilum).
J'ai activé les feux, préparé la grande bassine pour
que Véro puisse se baigner, essayé d'écouter le coeur
du bébé, sans succès et me suis mis à la disposition
de Véro.
Rapidement les contractions deviennent très douloureuses, les premières
heures, le bain chaud calme en partie la douleur, puis
Véro me demande des compresses très chaudes sur les lombaires
plutôt que le bain.
Elle passe de la position assise sur des couvertures, adossée à
des coussins, à la position accroupie à 4 pattes.
Cris de douleur, nausées, vomissement, refus que je contrôle
l'évolution de l'ouverture du col, de peur d'être déçu,
peur de ne pas y arriver, ...je suis là, je lui tiens la main,
je soulage sa douleur avec les compresses chaudes, je vois Véro
vérifier presque à chaque contraction si elle sent avec
ses doigts arriver quelque chose mais me sens un peu frustré de
ne pas pouvoir vérifier l'évolution de la naissance.
Ca y est, Véro me demande de toucher, elle a senti quelque chose,
elle pense d'abord à la tête du bébé. Je touche
à mon tour, le col est tout proche, grand ouvert, je sens une membrane
lisse qui pousse les parois du col.
Je sens Véro plus forte face à la douleur, heureuse de sentir
que le bébé arrive.
Rapidement nous réalisons que la membrane qui pousse et fait le
chemin pour le bébé est la poche des eaux, elle écarte
autour d'elle et devient très visible extérieurement avant
d'éclater. L'eau est projetée à plus d'un mètre.
L'eau est propre, cela nous confirme que tout se passe bien.
Après, l'évolution est très rapide. A la contraction
suivante, Véro sent la tête toute proche, elle hurle de douleur,
me crie que la tête est là, tout en se mettant de nouveau
accroupie à 4 pattes.
La tête est en partie sortie, jusqu'en dessous du nez.
J'ai une impression de grande sérénité dans ce visage
et en même temps je ne vois aucun signe de vie, le visage d'un enfant
qui dort (ou qui est mort? cette pensée me traverse aussi l'esprit
mais je ne vois aucun signe de souffrance sur ce visage pour alimenter
une inquiétude).
Véro hurle sa douleur, sa demande d'aide.
Adelaïde (4 ans et demi) s'est réveillée et nous rejoint.
Elle prend peur en voyant la tête du bébé et se met
à pleurer.
Je prends la tête du bébé avec mes deux mains de chaque
coté du visage, et j'essaye de tirer d'abord doucement et progressivement
un peu plus fort. Je sens une résistance. Je demande à Véro
de me confirmer si elle est en contraction pour tirer à nouveau
au moment de la contraction. Dans le même temps je glisse mes doigts
le long de la tête du bébé et sens le cordon qui est
là, il semble tendu au niveau du cou mais le bébé
ne semble pas souffrir. Je glisse deux doigts sous le cordon pour le lever,
je sens Véro qui pousse, mon autre main est sous la tête
du bébé, et tout d'un coup je sens le bébé
qui glisse dans mes mains, il est là ! c'est un garçon!
c'est Auguste!....
Véro se retourne pour le prendre contre elle, il respire et émet
ses premiers sons. Pas de cris, des petits gémissements attendrissants.
Nous sommes un peu surpris par sa propreté, sa peau lisse, il est
vraiment beau ce bébé.
Véro est heureuse aussi de constater qu'elle ne s'est pas déchirée.
J'aide Véro à mettre Auguste au sein mais c'est un peu tôt
pour lui, il en est à son apprentissage de la respiration.
Véro s'inquiète de la délivrance, elle me demande
de remplacer bébé dans son travail de succion pour faciliter
la délivrance.
Peu après bébé prend le relais (beaucoup mieux que
moi) et la délivrance sort presque entièrement (impressionnant,
je ne me rappelais pas que c'était aussi volumineux).
La délivrance reste attachée, véro ne veut pas bouger
de crainte d'une hémorragie (comme vécue pour la naissance
précédente). Je lui apporte une bouillote et une couverture.
Nous nous décidons à couper le cordon après avoir
posé deux ligatures plastiques.
Je prends Auguste contre moi pour le maintenir au chaud.
Véro s'inquiète d'une possibilité d'hémorragie,
elle me demande mon avis pour un départ pour la maternité
en prévention et me demande d'habiller Auguste pour que nous puissions
partir rapidement si besoin..
Nous l'habillons mais Véro ne veut pas bouger tant que la délivrance
ne s'est pas complètement détachée. Le bébé
qui tête déclenche de fortes contractions.
Le temps passe, Véro a pris une nouvelle fois Caulophilum, elle
a de fortes contractions et la délivrance finit par se détacher
complètement.
Véro se sent mieux, elle ose se déplacer à nouveau,
elle s'installe plus confortablement pour faire téter Auguste.
Je l'aide à se déplacer et à se laver, nous découvrons
alors une tache de sang sur les vêtement d'Auguste. La ligature
du cordon n'était pas suffisamment serrée et a laissé
passer une quantité de sang suffisamment importante pour nous inquiéter.
Nous avions opté pour une ligature plastique qui ne pouvait pas
se desserrer en pensant que ce serait plus efficace que de la ficelle.
Finalement c'était une erreur et nous avons complété
avec un bout de ficelle.
Nous avons coupé le cordon au moins une demi-heure après
la naissance, la ligature avait apparemment fortement serrée le
cordon mais le fait est que ce n'était pas suffisant.
Véro exprime encore plus fortement son inquiétude, j'ai
le sentiment qu'elle est partagée entre son besoin de se sentir
plus en sécurité en se rendant à la maternité
et son désir de vivre la naissance à la maison jusqu'au
bout.
Nous fixons ensemble les conditions qui seront nécessaires pour
que nous partions à la maternité.
L'inquiétude disparaît en grande partie et permet de mieux
apprécier, mieux réaliser le coté merveilleux du
moment présent et des heures que nous venons de vivre.
Nous sommes heureux et fiers d'avoir vécu cette naissance dans
les conditions que nous avions choisi.
La présence d'une personne appréciée de nous deux
aurait été bien utile par moments pour vivre avec plus de
facilité cette naissance.
Nous avons eu aussi parfois le sentiment de manquer un peu d'organisation.
La naissance s'inscrit dans une histoire d'amour, nous la vivons plus
ou moins bien en fonction de ce que nous sommes, individuellement et vis
à vis de l'autre.
Je pense que l'homéopathie a participé un peu au bon déroulement
de cette naissance.
Véro est très loin d'avoir vécu une naissance sans
douleur, elle a été formidable. Elle a réussi à
gérer sa douleur et à trouver la force en elle pour vivre
cette naissance.
Nous n'avions pas le matériel pour contrôle le rythme cardiaque
du bébé alors que nous le souhaitions. Cela ne nous a pas
vraiment perturbé mais j'aurai aimé pouvoir le faire.
Serge.
|