Une grande douillette accouche à la maison Lors de l'accouchement, on devient extrêmement "suggestionable". La volonté, en dehors de son aspect instinctif, n'a pas vraiment le loisir de s'exercer. D'où l'impossibilité de refuser une péridurale offerte tout sourire, spécialement quand la douleur est intense. A l'hôpital, une femme a absolument besoin d'une autre personne pour faire l'intermédiaire avec les soignants (style doula). Je crois que mon propre cas est exemplaire : j'ai toujours été une grande douillette, ma mère disait que je pleurais avant d'avoir mal (ça a du me conditionner) etc... Je n'ai pas déçu lors de mes accouchements, notamment pour le second, réclamant en hurlant littéralement l'anesthésiste, une vraie furie, tant j'avais peur de la douleur... Pourtant j'avais bien suivi les cours de sophrologie, mais pour moi, cela n'a aucunement aidé. Quand je me suis préparée pour un AAD, j'étais gonflée
à bloc par toutes les belles histoires de naissance que j'avais
lues. La douleur était présente, oh ça oui, mais
un sens lui était rendu. Je comprenais mieux la notion de laisser-faire,
lâcher que la décontraction pronée dans les cours
de visualisation. D'histoire en histoire, j'ai puisé du sens, de
la force et surtout de la foi... J'ai aussi compilé tous les "trucs"
qui avaient vraiment aidés ces femmes ; pas ceux qu'on donne avant,
ceux qu'on recommande après. Evidemment, le fait d'être chez
soi, aimée, entourée ou isolée (pour moi c'était
la solitude, la nuit et le silence qui marchaient), de savoir que les
dés en sont jetés etc;;; ça aide plutôt. Mentalement,
j'étais préparée comme un sportif de haut niveau.
J'avais affiché en gros caractères les "trucs"
qui devaient m'aider, une feuille dans chaque pièce. Parmi eux,
une "technique" d'Indiens d'Amérique du Nord qui a super
marché pour moi : après chaque contraction, vérifier
que les mains soient bien ouvertes et détentues, faire remuer les
orteils et sourire pour s'assurer qu'il n'y a aucune tension. Le yoga
m'a aussi bien aidée : dans la douleur très dure, je me
disais que mon être ne se réduisait pas à mon corps,
qu'en conséquent je n'avais pas à être enfermée
dans la douleur car ce qui était vraiment moi ne connaissait pas
la douleur. On peut appeller cela la dissociation mais je n'aime pas dire
cela car cela ne m'empêchait pas d'être à 100% consciente
de donner naissance, heureuse de le faire ; simplement, la douleur était
un choix. Le résultat, c'est que je sentais la douleur mais comme
quelque chose de très lointain par rapport au sentiment intense
d'être...dans l'absolu. J'ai essayé aussi de ne jamais perdre de vue POURQUOI j'étais là, d'être à fond dans la naissance, d'être le passage, de laisser le bébé et la "nature" (?) faire leur oeuvre. Cela en a fait l'expérience la plus incroyable de ma vie. Considérer qu'accoucher est spirituel, transforme totalement l'expérience. En transition, cela ne m'a pas empêché de dire à
mon mari que je regrettais, que la péri c'était super, mais
avec humour et je me rappelle avoir pensé : "Si on me proposait
de me transporter par magie à l'hôpital, je refuserai tout
de même". Il y a vraiment beaucoup à dire sur les rapports
entre douleur, suggestion, volonté, désir.... et je trouve
incroyable que les soignants soient si ignorants sur cet état spécial
de la femme qui accouche pour penser que sa volonté et son cerveau
fonctionnent comme d'habitude. Pascale |