La naissance pensée et vécue comme ça, ça change TOUT

Ca y est, la petite Elsa est arrivée !

Après mes (brefs) passages sur la liste, j'avais envie de vous raconter la suite de l'histoire... C'est une belle histoire, et elle finit bien.

Je l'avais briefée cette petite, pour qu'elle arrive assez tôt pour couper court aux vélléités de déclenchement, voire de césarienne, de l'obstétricien... et elle a commencé à se manifester tranquillement un soir, quelques jours avant le terme... tout en douceur, une contraction gentille toutes les 20-25 minutes, pas vraiment douloureuse, juste un peu différente de celles des jours précédents... le lendemain matin, idem... on est partis se balader avec mon homme, qui avait eu la bonne idée de faire débuter ses congés ce jour là... à partir de midi, un peu plus fort... mais sympathique, genre je frappe doucement au carreau, coucou, c'est moi, je vais arriver bientôt... nous avons (bien) mangé, regardé un film (et je ne me souviens pas vraiment de l'histoire :-)), chanté en s'accompagnant au piano et à la guitare (impeccable pour ne pas rester centrée sur la douleur, et contrôler le souffle), c'était drôle et agréable. Bu beaucoup de thé aussi, et retrouvé la bouillotte qui traînait depuis mille ans sous le lit.

Entre 16 et 18h les contractions se sont sérieusement rapprochées et amplifiées, nous avons appelé F. (ma sage-femme), et j'ai commencé à "faire l'ours" (la démarche estampillée Baloo) dans notre long couloir, parce que c'était le plus efficace... rapprochées, mais gérables, le temps de souffler, et la même surprise à chaque fois qu'elles refluaient, d'être bien, "normale", capable de sourire et de plaisanter... j'ai essayé aussi à genoux sur le canapé (pas mal), allongée sur le côté (pas concluant du tout, et impossible de se relever pendant), toute seule, avec petits massages de mon homme... sur ses genoux, en retrouvant les bienfaits de l'hapto...

Et puis ça a commencé à de venir plus dur, d'un seul coup... plus le temps de souffler, au sens propre comme au sens figuré, de plus en plus de mal à bouger entre deux, faute de temps, et j'ai commencé à me sentir comme un poisson hors de l'eau mais pas encore décidée à partir ou à rester... de toute façon, l'idée de prendre la voiture me semblait aussi flippante que celle de rester comme ça ! Les présences apaisantes de David comme de F. m'ont permis de prendre encore le temps d'y penser, sans me sentir obligée de rien... la douleur, mais pas de panique du tout, ou de contrainte d'aucune sorte... F. a proposé qu'on essaie de voir là où le bébé en était, réponse, col ouvert à 6-7 (sauf erreur ? :- )), et moi je l'ai entendu comme, il y a déjà beaucoup de chemin de fait... mais le plus dur reste à faire...

Pendant les contractions, qui se succédaient sans intervalles ou presque, même pas le temps d'une respiration profonde, j'avais mille questions en tête, combien de temps je peux tenir encore comme ça, si on part comment je vais supporter le trajet, comment on va être accueillis et surtout par qui, est-ce que ça vaut le coup de rester mais de prendre le risque d'être tellement à bout physiquement et nerveusement que je ne serai pas vraiment disponible pour la petite à l'arrivée ? finalement c'est ça qui a fait pencher la balance...

Ca, pour l'aspect raisonné ; aussi, plus ou moins inconsciemment, une trouille panique de "la dernière ligne droite" et de l'expulsion (quel affreux mot décidément) lié en grande partie au récit parfaitement insupportable de ma propre naissance (je vous passe les détails gore, que ma mère elle ne m'a pas épargné, y compris un petit bis qq jours avant l'accouchement)... aussi à l'intox des bouquins grand public (vous allez voir, ça va être de pire en pire...) lié sans doute, mais ça je n'ai pas fini d'y travailler :-) à tout ce que ça remettait en jeu, de devenir mère d'une fille... (je savais que je n'allais pas accoucher tout de suite le WE précédent, suite à une altercation - de plus - avec ma chère maman, suite à laquelle je sentais qu'il fallait d'abord que... je me calme...)

Je viens de lire les posts autour de la douleur et de sa perception, et je partage le point de vue selon lequel l'histoire familiale, à la fois telle qu'elle se vit au présent et telle qu'elle nous a été racontée ("mythes familiaux") rentrent fortement en ligne de compte !
En plus peut-être des rythmes physiologiques de chacune ???

Nous sommes donc partis pour la maternité, non sans que F. ait appelé pour demander qui était de garde ce soir-là : une collègue avec qui elle se sentait pouvoir travailler bien, et un anesthésiste OK pour les péridurales tardives : configuration rassurante avant même de quitter la maison !

Arrivée (les yeux fermés, guidée par David), attente pour raisons administratives (insupportable quand on vient uniquement pour être soulagée rapidement ! grrrrr !), le temps que l'anesthésiste arrive, le temps de commencer à sentir un peu l'effet de la péridurale... ce qui a pris un peu plus de temps que prévu... peut-être pas très forte la péri (???), en tout cas à la fois assez pour finir par me soulager, et suffisament légère pour que je puisse ressentir et vivre pleinement le fabuleux moment qu'a été la mise au monde d'Elsa...

Il y a eu entre les deux un délicieux moment de calme, où j'ai pu tranquillement me reposer, me retrouver... commencer à me réjouir ! Entre deux contractions je souriais, émue, ravie, impatiente...
Je suis encore bouleversée de ce que ça a été, de mettre au monde (ça c'est joli, contrairement à expulsion !!!) Elsa... je ne m'attensais pas à cette joie croissante, ni à ce que ce soit quelque chose d'aussi volontaire, actif, et beau...
Formidables bonheur et impression de force, et que mes limites habituelles étaient allègrement dépassées... (bon d'ac avec l'aide d'une p'tite piqûre... mais n'empêche...)

Je me souviens avoir dit, sur la table d'accouchement, à F., je ne regrette pas du tout d'être restée à la maison le plus longtemps que j'ai pu, et je ne regrette pas d'être venue, parce que je suis quasi certaine que je n'aurai pas vécu la naissance d'Elsa aussi sereinement. Je le pense encore...

Una naissance accompagnée de bout en bout par un mari attentif et deux sages-femmes adorables, dans une atmosphère calme et infiniment respectueuse, pas de boost hormonal (ce n'était plus la peine !), pas d'épisio, pas de forceps, pas de rasage, touchers vaginaux réduits au strict minimum (euh, 2 ?), personne d'autre que nous dans la salle excepté le passage de l'anesthésiste...

Juste avant minuit, la petite Elsa immédiatement dans mes bras, et un long moment d'intimité avant qu'elle ne soit pesée-mesurée vaccinée (euh non mais y a un peu de ça ! :-)), et les larmes de joie du papa, et moi ravie chamboulée heureuse...

Quand Léo est né (césarienne, en urgence, infection respiratoire, méga baby-blues après, troubles du sommeil durables, hurlements continuels...), je savais que j'étais passée à côté de qqchose d'essentiel ; mais je ne savais pas à quel point...

Elsa est un bébé merveilleusement paisible depuis, qui dort tranquillement quelquefois 5 ou 6 h d'affilée, se réveille paisiblement, a de longs moments d'éveil attentifs...

Alors... sûrement, qu'on pourrait trouver à redire malgré tout à certains inconvénients "médicaux" que nous n'aurions pas eu à la maison... notamment la prise en charge d'un petit malaise d'Elsa le lendemain matin, petit malaise qui n'aurait peut-être même pas eu lieu du coup d'ailleurs... ça pourrait faire l'objet d'un autre post, euh, "position d'accouchement, cyanose et ostéopathie ???", ou encore "le reflux imaginaire"...

Mais fondamentalement, c'était magique... parce que rien que les avantages des deux possibilités sans les inconvénients, parce que, merveilleusement accompagnée, avant, pendant, après, tant par David que par F., parce que, la petite Elsa est une telle éclatante démonstration que la naissance pensée et vécue comme ça, ça change TOUT...

Ce n'est qu'un des chemins possibles, mais pour moi c'était le meilleur, à ce moment là.

La petite Elsa chante, je vais aller la voir, bonne nuit...

Lulu