Je suis heureuse d'y être arrivée, d'avoir eu l'accouchement de mes rêves, celui que j'ai préparé et mûri dans ma tête et mon corps depuis si longtemps…

Voilà, j'ai accouché ce vendredi 26 mars d'une belle pte Lucie, par voie basse, presque 3 ans après la naissance de son gd frère
par césarienne...

Je voulais vous livrer mon témoignage, en espérant que ce sera un message d'espoir pour ttes celles qui tenteront l'avac un jour...
Pour vous dire que même quand tout semble "mal barré", il ne faut pas baisser les bras, y croire jusqu'au bout...

Lundi 22 mars. Ce que je redoutais est arrivé : le terme est dépassé… D'un jour seulement pour le moment, mais j'avais
secrètement espéré que mon accouchement me prenne « par surprise » en se déclenchant un peu à l'avance pour m'éviter la montée de tension en fin de grossesse. Là ça y est… Visite chez la gynéco, col à 1 doigt, mou et mi-long, mais bébé toujours haut qui semble être encore « bloqué » au niveau du pubis. Rien d'anormal d'après ma gynéco, mais afin d'être préparés, elle nous demande de choisir une date pour une césarienne au cas où le dépassement de terme se prolongerait trop, car elle ne veut pas risquer un déclenchement sur mon utérus cicatriciel. Nous choisissons le vendredi 2 avril, j'en serai alors à 41 semaines et 5 jours, il me semble que c'est le plus loin que je supporterais d'aller…
Nous sortons de cette consultation complètement démoralisés, le fait d'avoir déjà pris tous les rendez-vous, pour les monitos de
contrôle, l'anesthésiste, et évidement la césarienne, nous a mis devant le fait, qui n'est encore une possibilité mais qui nous rend
tellement tristes… Je téléphone à ma sage-femme qui me rassure, me dit que presque toutes les femmes accouchent après 40 semaines, que pour le moment tout se présente pour le mieux… Pour ce problème éventuel de bébé qui ne descend pas, elle me conseille une femme médecin qu'elle connaît et qui pratique l'haptonomie obstétricale, beaucoup plus poussée pour ce qui est des « manipulations » du bassin. J'arrive à obtenir un rendez-vous le soir même.
Cette femme est d'une douceur… d'une gentillesse… incroyable…
Elle travaille mon corps pendant une demi-heure, mon bassin, mon dos, ma nuque ma tête et enfin mes jambes, et là en me guidant, elle me montre comment faire descendre Lucie… Je la sens très basse… Elle me dit, « ça y est, votre autoroute est ouverte » (en référence au fait que d'après ma radiopelvimétrie, mon bassin n'est « pas une autoroute, mais juste ce qu'il faut ») et me montre quelques exercices à faire pour garder bébé bien engagé… Les jours suivants, je continue ma préparation « naturelle » en vue de l'accouchement : traitement homéopathique, tisanes de sauge et de framboisier, huile d'onagre… (vu la suite des événements, je pense que cela a été efficace !)
Jeudi 25. Je me couche à 21h30, les contractions que j'avais eues de façon épisodique toute la journée reviennent, environ toutes les 10 minutes et sont assez douloureuses mais gérables. A minuit, je prends un bain pour vérifier… non elles ne passent pas.
Stéphane se réveille, nous nous recouchons et nous comptons les contractions tout en discutant ; c'est très paisible, très beau comme moment, on espère que c'est pour cette fois-ci… S. me dit «maintenant au moins tu sais à quoi ça ressemble une contraction » (si on avait su !)
Mais vers 4h00, elles s'espacent et diminuent en intensité… Dépitée, je me rendors vers 4h30, pour être réveillée par Nico à 5h00 ! Après un petit câlin, il accepte de retourner dans son lit et je me rendors de 6h00 à 7h30…
Vendredi 26 donc. Toute la journée, j'ai encore des contractions relativement fortes mais irrégulières… Après un câlin avec S. (nous sommes vraiment très motivés !), je perds le bouchon muqueux. Puis cela semble se préciser vers 15h00, de façon plus régulière : nous décidons de partir vérifier à la maternité, en emmenant Nico et en prévoyant que, s'ils me gardent, les parents de S. viendront le chercher. Mais dans la voiture déjà, les contractions s'espacent de nouveau et perdent en intensité… A 16h00 : monitoring plutôt calme et toucher vaginal montrant que le col n'a pas fort évolué : 1 doigt et mi-long mais très mou, d'après la sage-femme c'est que les contractions travaillent bien quand même, elle me dit que quand le vrai travail commence, ça s'accélère d'un seul coup.
Elle ne croit pas si bien dire : en retournant vers le parking (vers 17h00 donc), puis pendant le trajet du retour (1/2 heure !), cela devient franchement fort et insupportable, toutes les 3-4 minutes…
On rentre, S. s'occupe de Nico (repas, pyjama, coucher), pendant ce temps je gère comme je peux, j'essaie un bain, mais les
contractions me broient de plus en plus le ventre, j'essaie de ne pas trop gémir, je ne veux pas que Nico m'entende lorsqu'il monte se coucher. Je descends alors, laisse un message sur Internet, tourne en rond dans le salon, j'essaie la position couchée qui m'était confortable jusqu'alors pendant mes « petites » contractions, mais c'est maintenant insupportable ! Ma sage-femme me l'avait pourtant dit que lors du vrai travail, c'était impossible de rester couchée… Mais moi je n'ai pas encore compris que ça y est, je me demande ce qu'il m'arrive, je pense que ce n'est pas normal d'avoir mal comme ça ! Je perds un peu les pédales, je supplie S. de me conduire à la maternité, qu'on me fasse une péridurale, une césarienne (eh oui !), n'importe quoi mais il faut que cela cesse ! Chaque contraction me dévore les entrailles et me prend avec violence, je ne contrôle plus rien, respiration, détente, me projeter dans bébé, oublié ! La seule chose qui me soulage un tant soit peu c'est la position debout, appuyée sur n'importe quoi, meuble, mur… Ainsi que crier… j'ai du mal à contrôler mes gémissements. S. me secoue, me dit fermement de me calmer… Nous appelons une amie pour venir garder Nico (qui dort déjà et ne se doute de rien).
20h40, on repart vers la maternité… Voyage d'enfer, ½ heure assise avec des contractions toutes les 2-3 minutes, je me « shoote » au Rescue, mais je tremble tellement que j'ai du mal à refermer le flacon… Je n'arrête pas de répéter que je n'y arriverai jamais, mais S. me rassure gentiment et fermement…
21h20, arrivée pénible à la maternité. Dans le couloir, des futurs parents attendent pour la visite mensuelle du service, j'essaie de
passer bravement devant eux pour ne pas les effrayer, mais je m'écroule sur le comptoir des sages-femmes en criant, pliée en deux par une contraction ! J'espère que je ne les ai pas trop traumatisés… La sage-femme qui m'accueille en salle de travail est très douce et rassurante, elle m'examine : 3 cm et bébé bas !
Youpie, alors ça y est vraiment, l'espoir renaît ! Elle me place le monitoring ambulant, je le sens à peine. Pendant une heure, je fais
le travail dans la pénombre, repliée en moi-même (j'ai l'impression d'avoir eu les yeux fermés presque tout le temps), assise sur un gros ballon, me balançant ou rebondissant légèrement dessus entre les contractions, et m'agrippant à l'écharpe suspendue au plafond pendant, en les accompagnant toujours de mes cris (parfois des « oui ! », parfois des « noooon… ») S. me masse les reins fermement et m'encourage avec un calme rassurant : « ah oui, elle est forte celle-là, elle est presque finie, ça y est ça diminue… »
Malgré cela, au plus fort de chaque contraction j'ai envie de crier «péridurale, péridurale »… puis elle passe, je me dis bon une de moins, j'ai survécu, on verra la prochaine…
Vers 22h30 je vais dans la baignoire, une énorme contraction me prend alors que je suis debout, panique, je sens que ça pousse !
Je m'allonge dans l'eau, la sage-femme m'examine : 5cm et effectivement Lucie est descendue d'un étage d'un coup ! Elle nous laisse… Moi je gamberge complètement, tout l'hôpital a dû m'entendre ! Quelques contractions plus tard, je sens de nouveau que ça pousse, je mets ma main instinctivement, S. m'en empêche, je lui crie d'appeler la sage-femme, elle arrive assez vite (elle a du m'entendre jusqu'au bout du couloir !) avec le gynéco de garde, très calme et gentil. Ce n'est qu'à ce moment-là que je me dis « ça y est alors, je vais accoucher par voie basse …» Jusque là, bizarrement, je n'y pensais pas du tout, au fait que je suis en train de tenter l'AVAC (Accouchement Vaginal Après Césarienne), j'ai complètement oublié cela, lâché prise spontanément, je suis tellement centrée sur mes contractions, je ne pense qu'à elles, si fortes que je n'ai pas le temps d'avoir peur, de m'inquiéter d'une éventuelle stagnation, souffrance fœtale, rupture utérine, césarienne ou quoi que ce soit qui me faisait si peur avant. Là ça y est, je sais, à ce stade, que « ça va passer ! »
Les contractions poussent de plus en plus fort, je ne peux empêcher mon corps de s'arquer et de pousser ma fille que je sens dans mon bassin… Je perds les pédales, je crie « je vais mourir », et là je sais que si je dis ça c'est que c'est bientôt la fin (une petite partie encore consciente de mon esprit se souvient avoir lu cela dans un texte de Michel Odent…) La sage-femme m'examine, effectivement il reste juste une petite bande de col, il faut y aller doucement, ne pas pousser encore, mais c'est si fort ! Je respire en haletant spontanément (genre « petit chien ») pour me retenir. Là, ma sage-femme Sylvie arrive, et sa présence, son empathie habituelle ont toujours le même effet magique de me rassurer… Ils sont donc quatre autour de la baignoire, très calmes, ma sage-femme et S. qui m'encouragent doucement, m'aident à reprendre pied pendant les contractions, puis entre, tout le monde fait silence, il fait toujours très sombre, seul un spot doux au plafond éclaire mon entrejambe… Il y a un moment de latence… jusqu'à la suivante.
Bébé descend de plus en plus, moi je trouve ça long, je voudrais qu'elle sorte maintenant ! Enfin, la sage-femme m'autorise à pousser, je peux me laisser aller, tout ouvrir en moi, ça me prend de partout… (avec le recul, je me sentais comme possédée, c'était un peu «L'exorciste » !) Au bout de 3-4 contractions, j'y mets tout mon cœur, et la tête sort… Moment magique où je vois cette petite tête entre mes jambes, et je la sens bouger légèrement… Puis sur la poussée suivante, elle sort entièrement… Grand silence, je revois encore ce petit corps qui flotte dans l'eau, et effectivement il y a comme un flottement dans l'air, un moment intemporel (qui n'a pas du durer plus de 2 secondes)… et la sage-femme me dit que je peux la prendre… Oh oui ! Je saisis son petit corps et je l'attire sur moi…
23h00… c'est le bonheur total… Bonjour ma petite Lucie… Elle pleurniche une petite fois, on est émus, les larmes aux yeux, on
la câline, elle est belle…
S. clampe le cordon une fois qu'il a cessé de battre, puis on me sort et m'installe sur la table avec ma puce toujours contre moi.
On attend l'expulsion du placenta qui tarde un peu, alors je mets Lucie au sein pour augmenter les contractions de délivrance, elle
tète comme une championne ! Le placenta sort enfin au bout d'une demi-heure. Le gynéco vérifie que je n'ai pas de déchirure : non, ouf ! Juste quelques éraillures sur les lèvres, il décide de faire 4 points pour mon confort ( ? d'après ma sage-femme un seul suffirait), mais nous laisse d'abord seuls tous les 3 pendant une demi heure … Pendant la suture, j'en ai marre, j'ai envie qu'on me laisse tranquille, à ce niveau-là, je suis hyper douillette, pourtant il m'a anesthésiée localement… Pour penser à autre chose, je regarde S. qui habille Lucie, la pèse (3,350 kg) et la mesure (49 cm), ma sage-femme lui donne ses « médicaments » ( ?) indispensables, mais pas de collyre dans les yeux, pas d'aspiration ni quoi que ce soit de pas vraiment utile.
1h30, on m'emmène à ma chambre, je m'évanouis en montant sur le fauteuil roulant, je me réveille la tête toute bourdonnante dans le couloir… On nous installe dans la chambre, S. reste dormir avec moi, on admire notre petite Lucie dans son lit en plexi, elle est si belle ! Elle a une toute petite tête (33,5 cm), des cheveux noirs qui lui descendent bas sur le front, des petits yeux de taupe foncés, un nez tout menu et pointu, et une belle bouche ourlée, comme son frère. Ses oreilles sont minuscules et bien collées contre son crâne, ses doigts longs et fins… On parle encore un peu, on n'en revient pas d'avoir fait cette merveille, on y est arrivés !
On s'aime, c'est beau… S. me dit que j'ai été super, je lui dis que sans son aide je n'y serais jamais arrivée, il a autant « travaillé » que moi ! Il s'endort et se met à ronfler, comme toujours quand il est très fatigué…
Moi je n'arrive pas à dormir, je suis épuisée et toute endolorie, mais comme en état de choc, mon cœur bat la chamade, je suis encore toute secouée par la tempête que je viens de traverser, je n'arrive pas à y croire… Cette force, cette violence… J'ai une peur un peu irrationnelle de devoir recommencer (j'ai dit à S. : «c'est la dernière fois c'est trop dur ! »), a posteriori ça m'effraie complètement toute cette douleur que je viens d'endurer. On dit toujours qu'une fois bébé déposé dans les bras on oublie tout, mais là je n'oublie pas, je ressens encore toute cette force de la douleur…
Je suis aussi heureuse d'y être arrivée, d'avoir eu l'accouchement de mes rêves, celui que j'ai préparé et mûri dans ma tête et mon corps depuis si longtemps… J'avoue que je suis fière de moi et que je me sens forte, même si malgré cela je ne peux m'empêcher d'avoir le sentiment de ne pas avoir été si forte que cela, j'ai quand même pas mal gambergé, sans le soutien de S. et des sages-femmes, je sais que cela n'aurait pas été possible (je réaliserai seulement plus tard que c'est tout à fait normal pour une femme qui accouche, surtout sans péridurale et avec un travail aussi « boulet de canon » - passée de 3 à 10 cm en à peine 1h30 quand même !) Je finis par m'endormir 2 petites heures, puis au matin Lucie se réveille et réclame mon sein… et nous commençons notre nouvelle aventure ensemble...

Caroline, maman de NICO (06/04/01, césa suite à un déclenchement pour "soi-disant" dépassement de terme, péri trop forte,
stagnation de la dilatation, souffrance foetale et "soi-disant" bassin limite!), et de LUCIE (26/03/04, avac après avoir un peu galéré et s'être bien bataillée!!!)