Le meilleur de moi-même

Je pense qu'en plus de la sensibilité unique de chaque être, vent se greffer une laaaaaarge part d'hormone à haute dose qui rend la vie parfois, il faut le dire, très difficile. Mais elles sont salvatrices ces hormones. Et plus nos bébés (qui savent ce qui doit être)t ètent, et plus il y a d'hormones, et moins la distance que la vie met par obligation entre les bébés et leurs mamans est grande. Et autant réceptives et à l'écoute nous restons. Alors c'est assez souvent pénible à gérer (je parle pour moi, tout dépend également du terrain de moissons aussi...) mais c'est bénéfique pour tout le monde.
Parce que la sensibilité en ce monde, ça n'a pas de prix. Et celle des mères, c'est tout l'or de la terre, ça fait déplacer des montagnes.

En allaitant, je suis partie à la conquête de moi-même. Et toutes les idées, tous les sentiments diffus que je me traînais depuis mon adolescence sans pouvoir y mettre une identité, je me les suis servie en direct dès mon premier mois de grossesse. Pendant un an avant d'être enceinte, j'avais un dérèglement du taux de prolactine (m'avait dit la gynéco) qui faisait que je perlais très régulièrement du lait ou ce qui y ressemblait du moins. Puis Théo s'est annoncé. E je me suis retrouvée au centre d'un phénomène impossible à maîtriser, avec des pics d'angoisse irréguliers, et la très réelle impression de marcher sur un terrain miné, avec des explosions épouvantables. MAIS un réel bonheur à vivre ces 8 mois et 1 semaine en symbiose avec Théo. A ce moment là, l'intervention sordide et très néfaste d'experts en rien du tout m'a fait provoquer en une nuit ce que dame nature n'avait cetainement pas prévue ainsi. Le 15 février 2001 à 18h, on me promet une césarienne et un déclanchement. Rendez-vous à prendre.
Le 16 février à 6h00, un lâché d'hormones me lance une très étonnante première contraction dans le dos. Une deuxième à 7h00, puis des contractions toutes les 3 à 5 minutes ni plus, ni moins (moins, ça n'était pas possible!!) toute la journée de ce 16 février, durant laquelle j'ai préparé comme j'ai pu ma maison, ma valise et celle de Théo. A 17h, quand mon homme est arrivé, j'ai pris une douche, à 17h30, tant bien que mal, on est parti en voiture à la mater toute proche, à 18h40, Théo est né.
Et je remercie ce feu d'hormones de m'avoir aidé à mettre au monde naturellement notre fils. Même si ce fut certainement, bien plus que pour moi, une journée trèès difficile pour Théo. Car à ce stade de contractions (11 heures de contractions toutes les 3 minutes, ce n'est plus un massage,à mon sens, c'est presque douloureux, mais il est resté dans sa poche jusqu'à ce que la sage-femme la perce).
Et je remercie mon fils depuis ce jour d'avoir tant téter, d'avoir tant demandé, que je me suis aujourd'hui enfin (re)trouvée. A vif, entière. Explosive. Engagée. C'est grâce à mon bébé, au lait qu'il fait venir en moi, aux hormones qui m'apaisent et me soulèvent tout à la fois.

Alors c'est vrai que tout m'enflamme, que j'ai l'empathie un peu trop développée quant aux extérieurs parfois, qu'on me regarde en coin pour parer à toute explosion d'émotion incontrôlable, que mon amoureux m'interdit de reportages télévisés (ou autres) traitant de la petite enfance tous sujets confondus, que je passe pour l'originale de service sur mon lieu de travail (sans méchanceté toutefois), que certains de mes invités me trouve pathologique de laisser Théo téter 5 fois en 10 minutes, assise sur sa petite chaise de bureau pendant que je prends l'apéritif avec eux, que mes amies (d'avant) ont pitié de moi, pauvre porte-mamelles qui ne vois pas l'utilité de l'école à 2 ans et demi, MAIS, alors même que je vide à grand peine les bacs à linge sale, que je passe l'aspiro quand Théo me le rappelle, que je pars au boulot sans ardeur particulière, j'ai plus d'estime pour moi-même que jamais auparavant de toute ma vie. Parce que je suis fière de ce que je réalise jour après jour, alors que mes journées sont des feux de paille et que je n'en vois parfois pas grand chose, j'en vis du meilleur de moi-même l'essence même du pourquoi j'ai fait ces choix-là et aucun autre.
Ce n'est pas de la déprime, seulement une juste remise en place de ton échelle de valeur.
Ce n'est pas de la déprime, c'est de la plénitude, du bonheur à l'état brut. Voilà pour mon ressenti à moi.

Nathalie