Oui c'est possible (d'allaiter), même en cas de prématurité ou d'hospitalisation à force de persévérance ! Nous allons fêter les 6 mois (et les 6 mois d'allaitement) de Noé samedi !

Mon fils Noé est né prématurément pendant mes vacances d’été dans le sud de la France à 34 SA. J’ai longtemps eu le sentiment qu’on m’avait volé la fin de ma grossesse.

Je m’étais toujours dit que j’essaierai d’allaiter, puisqu’on peut toujours s’arrêter, alors que si on n’essaie pas, il est trop tard pour changer d’avis par la suite !

Passons rapidement sur les 3 jours à l’hôpital avec perfusion pour garder mon bébé dans mon ventre entre la perte des eaux et l’arrivée en salle de travail. Je n’ai pas eu de péridurale car l’anesthésiste n’arrivait pas à passer entre mes vertèbres (je n’aurais jamais cru que c’était possible ce genre de truc !) Je n’imaginais pas un accouchement comme ça, les jambes écartées pendant des heures au milieu du personnel qui rangeait ses seringues et rigolait entre eux sans trop respecter mon besoin de calme !
Aux derniers moments, je me suis concentrée sur la voix de la sage femme et dans ma tête j’ai parlé à mon bébé pour qu’il m’aide à le mettre au monde, un grand souvenir !
Après quelques courtes minutes sur mon ventre où on ne lui a pas laissé le temps d’arriver à téter, ils ont très vite emmené mon bébé alors que son test Agpar était bon.

Deux heures après sa naissance, quand j’ai pu sortir de la salle de travail, je suis allée le voir dans sa couveuse. Tout le long de notre séjour à l’hôpital, il a été relié à des machines qui surveillaient sa respiration et son cœur et qui couinaient jour et nuit au moindre mouvement inhabituel.
J’étais la seule côté maternité à ne pas avoir mon bébé gardé coté pédiatrie. La première nuit, il avait une sonde gastrique et on ne m’a pas réveillée. Mais dès le lendemain, je suis allée le voir toutes les 3 heures pour faire du peau à peau et essayer de le faire téter avec beaucoup de difficultés car il n’arrivait pas à saisir le mamelon assez profondément dans sa bouche.
Je n’ai pu avoir une chambre mère enfant avec une fenêtre sur la porte pour nous surveiller (!) que 5 jours après sa naissance. Il y avait 3 puéricultrices par 24 heures, plus ou moins bonnes conseillères ou plus ou moins "flics" : Il y avait celle qui me tirait sur le mamelon en le mettant de force dans la bouche de Noé avec une main qui empestait le tabac, celle qui me disait tout le temps « vous êtes sûre qu’il ne préfère pas l’autre sein », celle qui revenait toutes les 5 minutes pour constater qu’il ne tétait toujours pas…
Il y a eu des heures de découragement parce qu’il n’y arrivait pas, des espoirs fous lorsqu’il tétait enfin, des moments d’intense exaspération quand je répondais aux puéricultrices « non je ne change pas de sein maintenant qu’il y est enfin arrivé sous prétexte qu’en théorie il faut alterner », des « merci je n’y arrive qu’avec vous », des pleurs lorsqu’il fallait renoncer et le compléter à la tasse (Merci à mon chéri qui a envoyé paître une puéricultrice en lui disant de me laisser nourrir mon fils à la tasse moi-même), des essais difficiles avec le tire lait de l'hôpital, des conseils contradictoires au moment de l’engorgement de la montée de lait et toujours le personnel flic qui notait les heures, les durées des tétées, les selles, les températures, etc.
A noter : l’hôpital disposait d’une bibliothèque à l’usage des patients mais hélas pas de livre sur l’allaitement ou la prématurité.
Dès que nous avons pu sortir, nous n’avons pas demandé notre reste et nous avons pris le train pour rentrer à la maison. A ce propos, si vous rencontrez le problème d’accoucher à 900 kms de chez vous 7 semaines avant la date prévue, pensez à faire jouer les assistances comprises dans vos contrats d’assurances : retour en TGV 1ère classe 100% pris en charge de l’hôpital à la porte de chez nous. C’est très réconfortant et sécurisant mais personne ne vous donnera l’astuce sur place.

A la maison j’ai encore passé de longs moments à chaque tétée avant qu’il n’arrive à saisir le sein correctement. Mon chéri était épaté par tant de patience.
Et puis Noé avait un mois ½ quand il est enfin parvenu à saisir correctement le sein à chaque tétée.
Nous étions contre la sucette mais un jour où nous n’en pouvions plus de l’entendre pleurer, nous nous sommes résignés à en acheter une. Résultat : il pleurait de plus belle, exit la sucette. Elle a fait quelques rares réapparitions épisodiques pendant encore 2 ou 3 mois mais heureusement, la greffe n’a pas prise.
Nous avons installé notre bébé dans un berceau « side car » à coté de notre lit (coté maman) et nous pratiquions le cododo quand il ne voulait pas rester dans son lit. J’ai alors découvert l’incompréhension des pédiatres et de l’entourage avec toutes les mises en garde hélas habituelles « attention il vous teste, il va prendre l’habitude, etc. »

A 2 mois mon bébé s’est fait opérer d’une hernie inguinale et, grâce à l’allaitement, j’ai réussi à avoir une chambre mère enfant pour rester avec lui à l'hôpital. L’infirmière de nuit m’a fait une réflexion quand elle a vu que je prenais mon bébé dans le lit avec moi lorsqu’il pleurait la nuit «vous allez mal l’habituer mais je dis ça comme ça, c’est vous les parents». Elle pensait aussi pouvoir lui imposer une sucette mais n’y est pas parvenue. Le lendemain je suis allée le voir en salle de réveil, et j’étais au bord des larmes car non seulement j’avais les seins prêts à exploser mais en plus une infirmière m’a dit « je ne sais pas si vous pourrez l’allaiter car votre lait c’est peut être trop lourd pour lui ». Mais j’ai tenu bon et j’y suis arrivée grâce à mon mari qui m’a soutenue. J’ai vraiment l’impression que le personnel hospitalier jouit de leur toute puissance sur les mamans et qu'ils croient toujours savoir mieux faire. Conjointement à leur ignorance à propos de l’allaitement, c’est dévastateur.

Malgré les recommandations LLL, j'ai eu plusieurs engorgements assez douloureux qui sont je pense dus au fait que mon bébé peut téter un jour en continu puis beaucoup moins le lendemain. C'est un bébé aux besoins intenses avec qui j'ai passé tout mon temps jusqu'à ses 5 mois ½. J'ai demandé un congé pathologique pour prolonger l'allaitement et je dois être la seule à l'avoir fait à mon
travail. Et j'ai cumulé ensuite mes congés. Depuis mon accouchement je suis plus sensible et je pleure très facilement surtout lorsque je vois des femmes enceintes ou des bébés à la télévision !

J’ai repris le travail la semaine dernière. Je n'avais fait aucun stock de lait car je repoussais le moment de me mettre au tire lait. Grâce à vos conseils, après un essai pas évident avec le TL manuel d’Avent, j’ai loué un lactaline Personal d’Ameda double pompage qui est nettement plus efficace. C’est assez difficile de trouver un moment pour s’isoler et tirer mon lait, même une seule fois dans l'après-midi, car il n’y a pas d’infirmerie et les toilettes n’ont pas de prise de courant !
Les collègues me regardent comme une extra terrestre et j’ai peur que cela ne s’arrange pas avec le temps ! D’autant plus que je ne mange plus avec elles le midi car je préfère rentrer chez moi voir mon bout de chou qui est gardé par mon mari (au chômage depuis peu) ou par ma mère. Ils lui donnent mon lait dans la tasse à bec Avent, c'est un coup de main à prendre.
Dès que je rentre mon bébé est très souvent au sein, il se jette furieusement dessus avec de petits cris, ça fait plaisir à voir ! J'ai appris à faire beaucoup de choses d'une seule main, merci à mon chéri qui m'a toujours soutenue.

Il a tété toutes les 3 heures la nuit jusqu’à 3 mois 1/2. Puis il a "fait des nuits" de 7 heures pendant 2 mois et la semaine précédant mon retour au travail, il a recommencé à me réclamer toutes les 2 ou 3 heures !
Il s'endort dans son lit à côté de moi, puis au premier appel je le prends dans notre lit et je me rendors. Ca n'a pas l'air de déranger mon chéri. Si je me réveille et que j'essaie de le remettre dans son lit, il pleure.

J'ai le sentiment que parce que j'ai tellement galéré dans les débuts que je tiens encore plus à mon allaitement, ça devient mon cheval de bataille. Le plus dur, c'est d'être entourée de biberons et d'entendre des réflexions en tous genres : "tu arrêtes quand ?", "tu es sûre que tu as encore assez de lait ?", "quoi, il tète encore !", "tu es courageuse, tu t'embêtes alors que ce serait tellement plus simple de lui donner autre chose que ton lait quand tu n'es pas là", "tu dois être fatiguée", "ton bébé te teste, il ne faut pas se laisser faire", "c'est pas normal d'allaiter longtemps", etc… Et encore, je ne parle à personne du cododo !

Tout cela pour encourager celles qui doutent. Oui c'est possible, même en cas de prématurité ou d'hospitalisation à force de persévérance ! Nous allons fêter les 6 mois de Noé samedi !

Désolée d’avoir écrit un message si long, j’espère que vous avez eu le courage de me lire jusqu'au bout !

Sandrine, maman de Noé 28/08/03 allaité à 100 %