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Editorial n° 3
- février 2003
Et si l'allaitement maternel prolongé avait aussi pour fonction de nous apprendre le plaisir et l'amour ? En France, au-delà des 3 mois "réglementaires", la jeune maman qui poursuit l'allaitement se voit encore reprocher de continuer uniquement par plaisir (le sien et celui de son enfant), malgré les apports optimaux et les bienfaits du lait maternel qui perdurent longtemps après cet âge... Mais de quoi accuse-t-on exactement ce plaisir certes charnel et parfois sensuel, mais jamais sexuel ? |
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Le plaisir ne peut être malsain quand il est indissociable de l'amour. Or un nouveau-né, un bébé ou un bambin aime sa mère plus que tout autre être au monde... Son besoin de contact
peau à peau, satisfait par l'allaitement maternel, va de pair
avec un besoin de stimulations de tous ses sens, passant par la peau
et les odeurs des corps, la variété des goûts du
lait maternel, en plus des sons et de la vue, avec des paroles et des
regards qui se font face et se croisent ainsi plus souvent et toujours
plus longtemps qu'au biberon. Chez lui ce plaisir durera longtemps. Le plus souvent, si on laisse l'enfant téter et qu'on ne lui propose pas de prendre du lait sous d'autres formes, il s'y complaira plusieurs années, parrallèlement à la prise progressive de solides de plus en plus diversifiés et nombreux, comme le veut le développement physiologique naturel de notre espèce. |
Le plaisir que prends la mère à poursuivre l'allaitement au fil des mois n'a rien de malsain non plus. C'est la nature elle-même qui l'a conçu ! Tout naturellement,
le plaisir vient des hormones induites par la lactation, les endorphines
(morphines humaines) qui apaisent maman et bébé en fin
de tétée. Ce système de récompense, à
la fois hormone du plaisir et hormone anti-douleur est en jeu chaque
fois que nous faisons quelquechose qui est nécessaire à
la survie de l'espèce. Nous secrétons ces endorphines
lorsque nous naissons, lorsque nous faisons l'amour, lorsque nous accouchons
et lorsque nous allaitons... Sans le plaisir,
les femmes des siècles et des siècles passés n'auraient
pas allaité leurs enfants plusieurs années et nous ne
serions pas là pour en parler ! Nous oublions trop facilement
que pendant des millénaires, en l'absence des laits de substitution
aujourd'hui proposés massivement aux mères, les enfants
qui n'étaient pas allaités par une femme mourraient tout
simplement ! |
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Et si c'était en aimant sa mère de tout son corps animé de seuls désirs puérils, en y trouvant plaisir et satisfaction, que le petit de l'homme apprenait à aimer, tout simplement ? En posant les bases qui lui permettront de construire de futures relations d'amour saines, basées sur le don de soi, le respect de l'autre et le plaisir partagé... Et l'amour ne
s'accompagne-t-il pas forcément de contacts, de caresses, de
corps-à-corps ? Pensez-vous que l'amour puisse perdurer au
sein d'un couple qui aurait cessé d'avoir des contacts, de se
toucher... L'enfant lui confond les deux et ressent l'amour bien avant
de l'entendre et encore plus de le comprendre -d'ailleurs, qui veut
me donner une définition de l'amour ? Progressivement, avec le franchissement naturel de certaines étapes comme la mise en place du père, le sevrage naturel et décidé par lui, et enfin l'oedipe vers 5/6 ans, il ne sera dépendant de rien, si ce n'est du besoin d'aimer... et cherchera comme nous tous devenus adultes à revivre ce plaisir multisensoriel si puissant à travers une autre relation, sexuelle cette fois -avec, peut-être, moins de difficultés, de frénésie et de perversité, et plus de bonheur... Emmanuelle Blin |
Réactions d'internautes : |
Tu as fait plus que traduire ce que je ressens profondément. Ton texte est plein de sensibilité et de justesse. Je pense par contre que les personnes qui n'ont pas vécu une relation d'allaitement seront un peu sceptiques. Par envie peut-être... C'est un beau plaidoyer pour l'allaitement prolongé, qui en
a bien besoin tant il est méconnu. Il est vrai que j'essaie déjà
de promouvoir l'allaitement tout court auprès des femmes enceintes
de mon entourage. Petit élément autobiographique : J'ai été élevé dans une famille ou on ne se touchait pas beaucoup. J'ai toujours été très pudique. Eh bien depuis que je suis Maman, je me suis réconciliée avec tout ça. Je n'ai aucun mal à allaiter en public et j'apprécie ô combien cette relation charnelle avec ma fille. J'ai l'impression de me construire en donnant à mon bébé le meilleur de moi-même. Dans le même temps, c'est un bonheur que de la voir grandir en toute sécurité affective. Elle sait que, quoi qu'il arrive, le sein de maman est toujours là pour nourrir, consoler, câliner, jouer, etc. Merci pour ton beau site web que je recommande dès que j'en ai l'occasion. Claire, maman de Solène, presque 18 mois. |
Ce petit corps chaud blotti contre moi, qui boit sa vie à mon sein, et qui le sait, qui me le dit quand il me regarde droit dans les yeux... Cet enfant, encore si petit, déjà bien grand, tout rond de mon bon lait... Le plaisir que l'on ressent pendant les tétées est charnel, instinctif, animal. Plaisir mêlé de fierté, on est dans une bulle, plus rien ne compte que ce tout-petit à qui l'on donne et redonne la vie. Douces sensations, surtout lorsque les seins sont bien lourds et que la tétée les soulage. Tétée câlin, l'enfant se réconforte contre sa mère. Tétée dodo, sentir son enfant s'abandonner contre soi. Tétée complice, échange de regards où passe tout l'amour partagé. Plaisir de l'instant complice, plaisir de voir grandir son enfant grâce à son lait, plaisir d'être mère, tout simplement mais totalement. Oui, l'allaitement est un plaisir, visiblement partagé par cet enfant qui aime à se nicher là, tout contre le coeur de sa mère... Sophie, maman d'Arnaud, 7 mois moins 8 jours allaité à
100 % |
Ben, en fait, j'y réfléchis encore. Je suis en parfait
accord sur ton éditorial, c'est tout à fait ce que j'ai
ressenti au long de l'allaitement de Noah, mais aussi de celui de Kenny.
Et puis.... c'est tellement bien écrit ;-)) difficile de faire
mieux ou démollir ce que tu as dit. Thalie, maman de Kenny 6 ans 5 mois et de Noah 27 mois et demi |
C'est à dire que non, cela ne soulève pas en moi de vives
réactions mais de tranquilles certitudes. Laurence, maman de Paul |